Lettre aux élu(e)s breton(ne)s
Jetés sur les routes pour la énième fois en quelques mois, les salarié-es de Tilly-Sabco sont les victimes du dérèglement total de l’agroalimentaire breton.
Spécialisée dans l’abattage et la commercialisation de volaille bas de gamme dédiée à l’export, Tilly-Sabco ne peut survivre que sous perfusion de fonds publics, tout comme Doux, qui a fait face aux mêmes difficultés l’année dernière. Ces deux entreprises ont bénéficié, à elles seules, de plus d’un milliard et demi d’euros de restitutions (subventions à l’exportation) depuis 1994. Cette dépendance aux subventions n’est pas tenable et mène les entreprises du secteur dans l’impasse.
La crise actuelle est d’autant plus insupportable que les dirigeants savaient depuis longtemps que les restitutions finiraient par disparaître. En effet, le calendrier de disparition progressive de ces aides – qui détruisent les agricultures des pays du Sud et sont incompatibles avec les règles de l’OMC – a été arrêté dès 1994. Les producteurs liés à ces entreprises sont dans une situation tout aussi dramatique. Ils ne sont aujourd’hui plus livrés en poussins : les poulaillers se vident, c’est la ressource qui bientôt va manquer. Salariés et producteurs sont les otages de stratégies dévastatrices où le rendement immédiat a depuis longtemps pris le pas sur une stratégie de long-terme.
Le véritable problème n’est donc pas l’arrêt des subventions, mais bien l’absence d’une filière régionale structurée et durable. Pendant que Tilly-Sabco meurt faute de débouchés rentables, à cinquante-cinq kilomètres de Guerlesquin, « Vatedis », filiale de Gastronome-Terrena, s’approvisionne en poulets brésiliens pour fabriquer des nuggets bas de gamme. Où est donc la logique industrielle de territoire ? Qui peut croire un instant que l’avenir des salarié-es et des producteurs tiendra à la capacité à quémander des aides, sans remise en cause d’un modèle absurde à bout de souffle ?
Le Ministre de l’agriculture doit faire preuve de courage, ne plus céder aux manipulations et reprendre en main le dossier à sa base :
• Un audit sur la gestion financière de ces entreprises doit être réalisé.
• Les pouvoirs publics doivent plancher sur l’organisation d’une filière aviaire destinée à la production de produits de qualité à valeur ajoutée, destinée à reconquérir le marché français, qui importe actuellement 45 % de sa consommation de poulet.
Les élu(e)s régionaux EELV
Joël Labbé, sénateur EELV
Yannick Jadot, eurodéputé EELV