Joël Labbé. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens à remercier le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain d’avoir inscrit à l’ordre du jour cette proposition de résolution qui porte sur une thématique essentielle, le développement rural et le soutien que l’Europe peut lui apporter.
Nous en sommes tous ici convaincus, les territoires ruraux représentent une véritable richesse en raison de leur diversité, de leurs populations, de leur patrimoine naturel et culturel, de la qualité de vie qu’ils proposent, comme des viviers d’innovation sociale qu’ils portent, notamment pour la transition écologique et solidaire.
Comme le texte le souligne, ces atouts ont été mis en lumière par la crise sanitaire, qui a créé une envie de ruralité nouvelle, en lien notamment avec l’essor du télétravail. Mais cela ne peut faire oublier les inégalités dont souffrent les territoires ruraux, alors que nombre de politiques publiques, notamment européennes, restent axées sur le développement urbain.
Le texte le rappelle, les territoires ruraux rencontrent des difficultés pour l’accès aux soins, aux services publics, au numérique, qui est pourtant de plus en plus indispensable à la vie quotidienne, ainsi que pour l’accès aux commerces, aux transports en commun ou à un emploi, en particulier pour les jeunes.
Toutes ces difficultés peuvent susciter un sentiment d’abandon et de relégation au sein des populations rurales – nous partageons à cet égard le constat de l’auteur de la proposition de résolution.
Dans ce contexte, les politiques européennes, notamment les fonds européens consacrés au développement rural, n’atteignent pas leurs objectifs. L’agenda rural européen est donc une piste pertinente pour résorber ces fractures, en intégrant et en finançant le développement rural à hauteur de ses atouts et du poids démographique de ces territoires.
Les axes de travail de la proposition de résolution sont à cet égard tout à fait intéressants : revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs, accès aux services, à la santé, au numérique, lutte contre la pauvreté et les inégalités entre les hommes et les femmes, politiques ciblées sur les jeunes, interconnexion avec les espaces urbains, soutien aux initiatives locales et aux investissements de transition écologique, enfin, préservation et mise en valeur de leur patrimoine, notamment via un tourisme rural écologique.
Nous sommes également satisfaits de constater que l’économie sociale et solidaire figure dans les axes proposés par ce texte. On constate en effet son dynamisme et son intérêt pour la ruralité, avec par exemple le développement d’épiceries solidaires, de cafés associatifs, de tiers lieux, de magasins de producteurs…
Il nous semble important que le développement du logement s’effectue en lien avec les enjeux environnementaux, par exemple au travers du soutien à la rénovation de logements vacants et de la revitalisation des centres-bourgs.
Je voudrais toutefois m’attarder spécifiquement sur deux points qui mériteraient d’être mis en valeur.
Le premier concerne la question agricole. Effectivement, l’Europe s’est construite par le biais de la PAC. Mais derrière celle-ci, il y a un lien entre l’agriculture et l’alimentation dans l’ensemble des territoires, ruraux comme urbains. La relocalisation de l’alimentation est un levier majeur pour un développement rural fondé sur une agriculture paysanne dynamique, bien présente et préservée.
La future PAC continue d’encourager l’agrandissement des fermes, par le biais de ses aides à l’hectare et par son trop faible soutien aux petites fermes. C’est l’installation de nouveaux agriculteurs qui est mise à mal par ces aides, alors même que des personnes qui ne sont pas issues du milieu agricole aspirent à un « retour à la terre ».
L’agenda rural européen devrait donc s’articuler avec une PAC beaucoup plus écologique et favorable aux terroirs, aux territoires et, je le répète, à l’alimentation de proximité.
Le second point qui mériterait d’être mis en valeur dans l’agenda rural européen concerne le soutien à l’accueil des migrants en milieu rural.
Ce n’est pas la peine de se voiler la face : les migrants, nous allons devoir les accueillir. Cela ne veut pas dire les cantonner dans les périphéries des villes. Au contraire, la planification d’un accueil humaniste des migrants, quels que soient leurs pays d’origine, demande d’être pensée sur l’ensemble du territoire national, de manière régulée.
Ces populations, qui migrent, car elles n’ont pas le choix de faire autrement, viennent souvent de territoires ruraux. Elles pourraient contribuer à la dynamisation de nos territoires et de nos écoles. Elles pourraient apporter des bras pour les emplois en milieu rural et pour la réindustrialisation, qui y a aussi sa place, et évidemment à répondre aux besoins de main-d’œuvre agricole.
Pour toutes ces raisons, et en souhaitant que ces deux points soient mis en avant, nous voterons en faveur de cette proposition de résolution. (M. Ronan Dantec applaudit.)
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