LOCALTIS INFO – 25-01-2016
Le Sénat a poursuivi l’examen en séance en première lecture du projet de loi sur la biodiversité, dans la soirée du jeudi 21 janvier et le vendredi 22. Une centaine d’amendements restaient encore à examiner en milieu d’après-midi ce vendredi.
Plusieurs mesures concernant les milieux aquatiques ont été adoptées la veille en fin de journée. Après l’article 32 bis B, Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan, a obtenu le vote d’un amendement permettant de « faciliter la mise en œuvre du droit de préemption des agences de l’eau par le biais des Safer ». Celles-ci « mettront, ainsi, à la disposition des agences de l’eau leur savoir-faire d’opérateur foncier ». « Cette disposition devrait permettre le processus d’acquisition des agences de l’eau et par conséquent, de rendre plus effective leur mission de protection des zones humides », a soutenu Joël Labbé.
Compétence Gemapi
L’article 32 bis, relatif aux missions des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB), a été adopté sans modification. Le gouvernement a retiré l’un de ses amendements au profit de deux amendements identiques portés par les sénateurs LR Jean-François Husson (Meurthe-et-Moselle) et Jean-Claude Requier (RDSE, Lot) et adoptés à l’unanimité. Ils proposent « d’introduire dans la loi une procédure facilitée de transformation des institutions interdépartementales en syndicat mixte ». « Elle permettrait d’assurer la continuité des actes juridiques et de garantir l’avenir des personnels », « l’ensemble des personnels de l’institution étant réputé relever du syndicat mixte, dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les siennes ». Ils rappellent que « la création de la compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » (Gemapi) et son attribution aux communes et leurs groupements peuvent appeler les institutions interdépartementales intervenant dans ce champ à évoluer en syndicat mixte afin d’éviter la coexistence de plusieurs structures sur un même périmètre. « En l’état actuel du droit, il faudrait procéder à une dissolution de l’institution interdépartementale puis à la constitution d’un syndicat mixte », s’inquiètent les sénateurs, cette procédure pouvant « conduire à la déstabilisation de la structure du fait des transferts qui interviennent lors de la dissolution en termes de propriété et de moyens humains et financiers liés ».
A l’article 32 ter A, Jérôme Bignon (LR-Somme) a fait adopter un amendement de coordination avec la loi Notr. Après cet article, il a aussi fait adopter un amendement visant à « mieux coordonner les dispositions relatives à la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations entre code général des impôts et code de l’environnement, et à l’articuler avec la redevance pour service rendu dans le code rural et de la pêche maritime ». Un amendement du gouvernement a également été adopté avec l’avis favorable de la commission. Il vise notamment à « permettre aux communes et aux EPCI de lever la taxe Gemapi, même s’ils ont transféré tout ou partie de la compétence à un ou plusieurs syndicats y compris les établissements publics d’aménagement (Epage) et établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) ».
Mesures de compensation
Les sénateurs ont ensuite débattu du sujet controversé de la compensation, dernier volet du triptyque « éviter, réduire, compenser » qui doit être appliqué lors de la réalisation d’un projet portant atteinte à la biodiversité. Les articles relatifs à ce sujet sont placés au sein du chapitre II (mesures foncières et relatives à l’urbanisme) du titre V consacré aux espaces naturels et à la protection des espèces. Parmi les modifications intéressant directement les collectivités territoriales, deux amendements ont été votés à l’article 33 BA, qui prévoit la réalisation par l’Agence française pour la biodiversité d’un inventaire national des espaces naturels appartenant à des personnes morales de droit public et susceptibles d’être mobilisés pour la mise en œuvre de mesures de compensation. Le premier précise que l’inventaire est fait « en coordination avec les instances compétentes locales » ; le second, défendu par le rapporteur Jérôme Bignon ajoute que cet inventaire cible les espaces naturels à fort potentiel « de gain » écologique.
Le centriste Henri Tandonnet (Lot-et-Garonne) a fait adopter une série d’amendements créant une section 3 bis sur la protection des chemins ruraux (articles 35 bis, 35 ter, 35 quater et 35 quinquies). A la demande du sénateur socialiste de l’Aude Roland Courteau, l’article 36 bis AA qui prévoyait la participation du centre national de propriété forestière à l’élaboration des documents d’urbanisme (Scot et Plu) a été supprimé pour éviter un « alourdissement des procédures ». Le gouvernement a obtenu la suppression de l’article 36 quater A, qui visait à permettre la cession à titre gratuit d’immeubles du domaine privé de l’État à un conservatoire régional d’espaces naturels agréé, lorsque ces immeubles présentent une forte valeur écologique. « Les Domaines ont émis de justes réserves sur cet article : on ne peut aliéner les biens publics à titre gratuit sans évaluation préalable », a justifié la ministre de l’Écologie Ségolène Royal, au cours de la séance de nuit.
Prise en compte de la biodiversité urbaine
L’article 36 quater sur les continuités écologiques a été réécrit par un amendement de Jérôme Bignon, en « coordination » avec la réécriture du livre Ier du code de l’urbanisme par l’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme. Le groupe écologiste a obtenu le rétablissement de l’article 36 quinquies B qui propose que les plans climat air énergie territoriaux élaborés par les intercommunalités prennent en compte la biodiversité urbaine. De nouveaux articles (quinquies C et quinquies D) ont été créés à l’initiative du groupe socialiste pour insérer la notion de permaculture dans les documents d’urbanisme. Un nouvel article créé à la demande de Charles Revet (LR, Seine-Maritime) crée une section sur les vergers, dans lequel est inséré l’article 36 septies. Le gouvernement a obtenu pour sa part la ratification de l’ordonnance n°2015 – 1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme (article 36 octies).
L’examen du texte au Sénat devait s’achever ce vendredi 22 janvier au soir, et sera suivi d’un vote solennel le 26 janvier. Le projet de loi repartira ensuite en deuxième lecture à l’Assemblée.