Question crible thématique
Monsieur le président,
Madame la ministre,
Mes chère collègues sénatrices, mes chers collègues sénateurs,
Nous nous retrouvons aujourd’hui pour cette session de Questions cribles thématiques sur la forêt française.
Nous avons pris connaissance du rapport de nos collègues de la commission des finances intitulé : “faire de la filière bois un atout pour la France”. S’il est fort intéressant du point de vue diagnostique, je déplore que ce rapport aborde dans ces recommandations la problématique de la forêt française essentiellement d’une manière comptable. Il recommande notamment une recomposition de la forêt vers les résineux au regard de la demande.
Nous ne serons jamais compétitifs face aux résineux venant d’Europe du nord, car les méthodes massives d’exploitation ne sont pas transposables.
Cette approche comptable de court terme doit être revue afin de prendre en compte certes les aspects économiques mais aussi les aspects écologiques notamment la biodiversité et le stockage naturel du carbone.
On doit envisager d’innover en associant des essences à plus haute valeur ajoutée économique et renforçant les aménités environnementales.
Il est grand temps de repenser la forêt comme milieu vivant, de remettre en cause les coupes à blanc systématiques, nuisibles pour les sols et leur structure et très émettrices de carbone, la qualité et la santé de nos forêt auraient tout à y gagner.
Une parcelle forestière gérée durablement va permettre au sol de jouer son rôle de puits de carbone, objectif affiché par la France en vue de la COP 21 à travers le projet de recherche international 4 pour 1000 dont l’objectif est de développer la recherche agronomique afin d’améliorer les stocks de matière organique des sols de 4 pour 1000 par an. Une telle augmentation à l’échelle mondiale permettrait de compenser l’ensemble des émissions des gaz à effet de serre de la planète.
La biodiversité s’en trouve enrichie, dans les sols, et au dessus, au niveau faunistique et floristique. Quoi de plus triste et pauvre en biodiversité qu’une forêt ou ne pousse qu’une seule espèce.
Madame la ministre pouvez-vous nous indiquer quel est la position du gouvernement concernant la gestion des forêts françaises, afin de garantir une cohérence de l’exploitation et une amélioration des aménités environnementales en terme de biodiversité et de stockage du carbone dans les sols forestiers.
Réponse la secrétaire d’État, auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique…
> Publiée le 08/05/2015
Mme Carole Delga, secrétaire d’État. Monsieur Labbé, je tiens à vous rassurer : dans le respect de nos engagements européens et internationaux, la gestion durable est le principe de base qui guide la politique forestière nationale.
La récente loi d’avenir a d’ailleurs rappelé ce principe en reconnaissant d’intérêt général la protection et la mise en valeur des bois et forêts, ainsi que le reboisement dans le cadre d’une gestion durable.
L’importance des aménités forestières, que ce soit en termes de biodiversité, de lutte contre le réchauffement climatique ou de fonctions récréatives, est régulièrement réaffirmée. Le programme national de la forêt et du bois, en cours d’élaboration, en sera la traduction concrète pour les dix prochaines années. Pour autant, il ne faut pas perdre de vue que, à ce jour, seules la production de bois et la chasse sont génératrices de recettes et permettent aux propriétaires publics ou privés d’entretenir leurs forêts et d’y investir.
La forêt n’a jamais cessé d’être pensée comme un milieu vivant. La coupe rase ou à blanc ne signifie pas forcément destruction de la biodiversité ou appauvrissement des sols. Il est question de mesure ; il est question de savoir bien gérer la forêt.
Pour ce qui concerne les enjeux climatiques, la forêt et l’agriculture seront au cœur des négociations de la prochaine COP 21, conformément à la volonté affirmée à plusieurs reprises par Stéphane Le Foll.
La forêt et les terres ont un rôle très important à jouer dans l’atteinte des objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La dynamisation de la sylviculture – visée partagée par France Nature Environnement – et l’agronomie peuvent fortement contribuer à l’atteinte de cet objectif.
C’est à cette fin que Stéphane Le Foll a engagé le programme de recherche international « 4 pour 1 000 », qui se fonde sur le constat suivant : une augmentation de quatre millièmes de la teneur en matière organique des sols permettrait de compenser les émissions annuelles mondiales de CO2. Enfin, le programme national de la forêt et du bois devra trouver un équilibre entre une nécessaire valorisation économique de notre patrimoine forestier, très largement sous-exploité, puisque 20 % à 30 % seulement de la production annuelle sont prélevés, et la préservation de la biodiversité et des autres fonctions environnementales de nos forêts, comme l’épuration de l’eau.
Nous serons donc mobilisés et attentifs, pour une gestion durable de l’ensemble de nos forêts.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour la réplique.
M. Joël Labbé. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de vos éclaircissements, nécessaires lorsque la forêt devient trop étouffante. (Sourires.)
De nombreux aspects n’ont pas été abordés concernant les enjeux liés à l’arbre et la forêt : la préservation et l’entretien de la haie bocagère, qui joue un rôle essentiel, le développement de l’agroforesterie et, enfin, un domaine essentiel, qui fait la grande richesse de notre patrimoine forestier et dont on parle trop peu, les forêts primaires équatoriales.
En conclusion, n’oublions pas que la gestion forestière est du domaine du temps long. Que la forêt vivante puisse dans son profond silence et l’immensité de son mystère nous réapprendre ce que sont patience et longueur de temps… (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)