14 e législature / Question écrite n° 02977
> publiée dans le JO Sénat du 08/11/2012 – page 2519
M. Joël Labbé attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur les conditions d’hébergement des familles déboutées du droit d’asile.
Dans le Morbihan, les associations d’aide aux demandeurs d’asile, les services sociaux chargés de leur accompagnement et les enseignants qui suivent les enfants scolarisés font part de leurs expériences et de leurs inquiétudes quant au devenir de la quinzaine de familles déboutées du droit d’asile que compte le département.
Les CADA (centres d’accueil pour les demandeurs d’asile) sont chargés d’héberger et d’accompagner les requérants du droit d’asile jusqu’à ce qu’une réponse dite définitive intervienne. En cas de réponse négative, l’obligation est faite de quitter le centre dans les 30 jours suivant cette réponse. À leur sortie des CADA, la plupart des familles déboutées décident d’introduire une demande de titre de séjour et un recours juridictionnel contre la mesure d’éloignement prise à leur encontre, suite au refus de leur demande d’asile. Durant la période d’analyse par l’administration de leurs demandes, et, pire, lorsque l’administration se trouve dans l’incapacité juridique ou humanitaire d’organiser un retour de ces personnes vers leur pays d’origine (pays du Caucase et de la corne de l’Afrique de l’Est notamment), aucune solution de prise en charge n’est organisée, que ce soit au niveau du droit au séjour, du droit aux aides sociales, du droit au travail et du droit à l’hébergement. Seul l’hébergement d’urgence leur est accessible sous conditions. Face à l’engorgement du dispositif d’hébergement d’urgence, ce sont souvent les collectifs citoyens ou les collectivités qui doivent pallier les défaillances de l’État pour trouver des solutions d’hébergement provisoire pour ces familles. La préfecture, qui s’est engagée à ne pas laisser à la rue des familles avec enfants, ne propose aucune solution pérenne ni d’autres alternatives qu’un hébergement à la nuitée, souvent en hôtel, avec des déménagements fréquents. Ce « nomadisme » organisé des familles entre lieux d’hébergement, aide alimentaire et services sociaux, conjugué à leur absence de ressources et leur épuisement physique et moral, ne leur permet pas de mener sereinement leurs démarches administratives. Sans compter que cette situation de grande précarité entrave fortement la scolarisation de leurs enfants.
En sus d’une situation jugée humainement inacceptable au pays des droits de l’Homme, sont remis en question les coûts d’une telle politique. À ce titre, l’exemple du budget alloué à l’hébergement en hôtel d’une famille d’origine albanaise durant l’été est parlant. En 10 semaines, les sommes dépensées pour l’hébergement de cette famille dans des conditions inadaptées représentent environ quinze mois de loyer d’un logement social.
Face à la grande détresse de ces familles dont la situation administrative et le sort sur le sol français ne sont pas tranchés, il lui demande de préciser les mesures qu’il entend mettre en œuvre pour rompre avec la politique du précédent Gouvernement et garantir un droit au séjour, une offre d’hébergement stable et un accompagnement social adaptés à ce public spécifique.
Réponse de M. le ministre de l’intérieur
L’État a mis en place un dispositif public de prise en charge des demandeurs d’asile, qui prévoit notamment l’hébergement des demandeurs d’asile dans des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA). Son bon fonctionnement dépend notamment de la rotation dans les centres, la sortie des personnes dont le traitement de la demande d’asile est achevé, conditionnant l’entrée des nouveaux demandeurs d’asile. Ainsi, l’article R. 342-3 du code de l’action sociale et des familles (CASF) dispose qu’une personne déboutée de l’asile peut être maintenue dans le CADA pour une durée maximale d’un mois à compter de la date de notification de la décision définitive de rejet de la demande. Lorsque leur demande d’asile est rejetée, les demandeurs d’asile déboutés ont vocation à retourner dans leur pays d’origine, sauf s’ils sollicitent un réexamen de leur demande ou une admission au séjour à un autre titre que l’asile. Lorsque la décision négative leur est communiquée par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) ou la cour nationale du droit d’asile (CNDA), les préfets notifient aux intéressés une obligation de quitter le territoire français sous un délai d’un mois. Les intéressés bénéficient alors d’une information sur le dispositif d’aide au retour volontaire mis en œuvre par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Ce dispositif comprend une aide matérielle et financière (cette dernière s’élève à 500 € par adulte et 250 € par enfant mineur) au départ et une prise en charge du voyage depuis la France jusqu’à la ville d’arrivée dans le pays d’origine. Par ailleurs, l’OFII propose une aide à la création d’entreprise dans le pays d’origine en complément de l’aide au retour.