Monsieur le Président, Madame la Ministre,
mes chers collègues,
Il faut prendre conscience du fait que le mythe du retour durable de la croissance, qui mettrait fin à la crise, est illusoire, voire dangereux. Ce mythe nous empêche en effet d’élaborer des solutions de sortie de crise permettant l’émergence d’une économie moins carbonée.
On évoque souvent l' »exemple allemand ». Certes, il y a des expériences intéressantes chez nos voisins, mais, globalement, l’Allemagne n’est pas forcément un modèle à imiter pour la France ; il suffit de comparer les taux de pauvreté dans les deux pays. Essayons plutôt de travailler à un nouveau modèle français, en prenant en compte notre potentiel et nos capacités.
Cela suppose, dans un premier temps, de s’accorder sur le constat que la crise est multiple pour, dans un second temps, y apporter des réponses, qui doivent de notre point de vue passer par une véritable transition durable de notre économie.
À ce titre, les petites et moyennes entreprises et industries, les PME et PMI, qui sont à la fois créatrices d’emplois, innovantes et ancrées dans leur territoire, sont les forces vives qui permettront la nécessaire transition de notre économie, tant pour multiplier les emplois d’avenir que pour proposer des transitions aux emplois aujourd’hui menacés. Nous devons saisir toutes les possibilités qu’offre cette mutation.
En effet, la crise que nous traversons actuellement est multiple : crise de la dérégulation financière, explosion des inégalités, qui en est le corollaire, et grave crise écologique.
Cette année encore, et cet état de fait va perdurer, la consommation est restée globalement faible, les ménages ayant plutôt adopté des stratégies d’accumulation d’une épargne de précaution. Par ailleurs, les exportations, notamment vers les pays émergents, étaient encore trop faibles pour tirer l’activité globale. Si nous devons avoir des objectifs en termes d’exportation, il faut aussi aborder la question de la consommation locale et y apporter des réponses. J’y reviendrai dans quelques instants.
Quant aux solutions keynésiennes classiques de relance, à supposer qu’elles puissent être mises en œuvre, elles se heurteraient aux défis environnementaux, en particulier la hausse du prix des matières et de l’énergie, à laquelle nous ne couperons pas.
Réindustrialiser nos territoires dans le respect de l’homme et de l’environnement, produire local et rapprocher le producteur du consommateur, soutenir les PME innovantes, investir dans la recherche pour développer les technologies vertes, voilà où réside une part de notre avenir.
Il faut aller vers une économie plus sobre et, en matière agricole et agroalimentaire, vers une agroécologie qui réoriente les modes de production.
Prenons l’exemple du désastre, car c’en est un, de la société Doux – j’évoque la Bretagne, puisque je suis moi-même élu de cette région –, qui a profité des aides européennes pour exporter du poulet bas de gamme alors que la France importe le tiers des poulets qu’elle consomme. Nous avons les outils de transformation et le savoir-faire ; essayons donc d’apporter des réponses en termes de consommation locale et nationale.
Il faut développer un aménagement du territoire qui se donne comme priorité une relocalisation de l’économie et une proximité des emplois, des services et des logements.
De même, nous devons développer des emplois verts non délocalisables dans des secteurs d’avenir. Je pense évidemment au bâtiment, aux énergies renouvelables, comme l’éolien ou le solaire, qu’il soit thermique ou photovoltaïque, aux transports et aux diverses nouvelles technologies.
Les PME et PMI peuvent être, je l’ai indiqué précédemment, les forces vives qui nous permettront d’organiser la nécessaire transition de notre économie vers une économie moins carbonée. Il est primordial de faciliter réellement l’émergence et le développement de celles qui, tout en innovant, respectent des impératifs sociaux et environnementaux.
Concrètement, les mesures à prendre sont, selon nous, multiples.
Premièrement : orienter les crédits de recherche vers les PME innovantes plutôt que vers les grands groupes, qui peuvent en profiter puis délocaliser.
Deuxièmement : favoriser l’accès à la commande publique pour les PME et PMI, qui souffrent, plutôt que pour ces mêmes grands groupes.
Troisièmement : alléger l’imposition des structures de l’économie sociale et solidaire.
Quatrièmement : investir sur la formation. C’est évidemment primordial. Outre la formation initiale, chacune et chacun devraient à terme pouvoir bénéficier d’un crédit d’un certain nombre d’années de formation tout au long de la vie.
M. le ministre du redressement productif a souligné à plusieurs reprises que nombre de nos PME et PMI étaient des pépites technologiques. Nous souscrivons à cette idée, et nous réaffirmons la nécessité de soutenir davantage celles qui innovent dans des secteurs d’avenir, créent des emplois non délocalisables et participent à l’aménagement et au développement de nos territoires.
J’ai eu quelques contacts avec des chefs d’entreprise dans le train. L’un d’eux, qui travaille dans le domaine de l’acier, m’a indiqué que tout son matériel provenait du Japon ; apparemment, ce pays est à la pointe en la matière, ce que j’ignorais. L’acier, nous en avons. Ne pourrions-nous pas nous aussi investir dans ce domaine ? Selon un autre, qui travaille dans la conception de bateaux, les pays nordiques sont beaucoup plus en avance que nous sur l’utilisation éolienne en complément de l’énergie des moteurs sur des bateaux de taille moyenne.
Cet après-midi, nous avons évoqué les travaux de la mission commune d’information sur les pesticides. Il est question de faire en sorte que ces produits ne soient plus utilisés sur les espaces publics communaux. Pour cela, nous avons besoin de matériel de désherbage mécanique. Or, aujourd’hui, en agriculture comme dans les espaces communaux, nous importons ce matériel d’Autriche. Pourtant, nous avons le savoir-faire. Nous devons pouvoir le mettre en œuvre et répondre aux demandes en termes de proximité.
Voilà quelques exemples sur lesquels je souhaitais appeler votre attention. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)