14e législature / Question écrite n° 15235
> publiée dans le JO Sénat du 12/03/2015 – page 540
M. Joël Labbé attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les actes de violences, les menaces et, plus généralement, les obstacles croissants aux contrôles auxquels sont confrontés depuis plusieurs mois les inspecteurs de l’environnement des services de l’État et des établissements publics (office national de l’eau et des milieux aquatiques – ONEMA, office national de la chasse et de la faune sauvage – ONCFS), en charge des contrôles environnementaux dans les exploitations agricoles.
Alors qu’une évaluation générale des politiques régaliennes de police de l’environnement est en cours depuis près d’un an sous l’égide du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, le Premier ministre a demandé à un parlementaire de lui faire des propositions de réforme des politiques de contrôle environnemental, et le ministre de l’agriculture a demandé au préfet de la région Bretagne un travail de réflexion et de proposition visant à coordonner les divers contrôles opérés dans les exploitation agricoles. Ces missions se situent dans un contexte marqué par une demande d’assouplissement des contrôles, émanant de plusieurs syndicats agricoles à l’origine de mouvements fréquents de manifestations souvent violentes et destructrices de biens publics.
La directive 2008/99/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal demande aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour que les infractions environnementales soient passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives. Pourtant, les carences dans le contrôle environnemental des activités agricoles sont manifestes, comme l’ont dénoncé des rapports de la Cour des comptes (Les instruments de la gestion durable de l’eau, dans le rapport public annuel pour 2010) et le Conseil d’État (L’eau et son droit, dans un rapport paru en mai 2010), ou encore la justice administrative qui a retenu la responsabilité de l’État en le condamnant au regard de ses carences en matière de police de l’environnement à plusieurs reprises, notamment dans le domaine des marées vertes.
Les collectivités publiques et associations, engagées dans les onéreux programmes de reconquête de la qualité des eaux qui tardent à démontrer leur efficacité, sont inquiètes des risques d’affaiblissement de l’action de contrôle environnemental dans le domaine agricole. Celui-ci constitue un maillon indispensable de l’application des législations environnementales, et de la nécessaire restauration de l’état de l’environnement conforme à ses obligations européennes.
À l’heure de la double condamnation récente de l’État français devant la justice européenne pour carences d’application de la directive n° 91/676/CEE du 12/12/91 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles, il lui demande s’il lui parait opportun de faire exception, pour les contrôles environnementaux menés dans les exploitations agricoles, aux règles générales d’enquête judiciaire établies par le code de l’environnement et le code de procédure pénale, pour la recherche et la répression efficace des infractions environnementales, notamment par le biais de chartes, sources de complexification inutile et d’affaiblissement de l’autorité de l’État.