25 > 28 février 2015 / Visite d’Etat en République des Philippines [Manille]
Déplacement aux Philippines
J’ai été invité à joindre la délégation autour de Nicolas Hulot qui accompagne le président Hollande pour la première visite officielle d’un chef d’état français en République des Philippines. Ce voyage s’inscrit dans la perspective de la grande conférence environnementale de Paris en décembre 2015.
Ce choix des Philippines n’est pas un hasard : l’archipel des Philippines est l’un des plus touchés au monde par le réchauffement climatique. Violentes tempètes et typhons s’y succèdent. Le typhon Haiyan, le 8 novembre 2013 a causé la mort de 7 350 personnes ! Dans la lutte contre le réchauffement climatique, la voix Philippine est l’une des voix progressistes parmi les pays en développement. La France, elle, ayant pour ambition, et pour responsabilités de tirer vers le haut les voix des pays développés qui portent une énorme part de responsabilité dans le dérèglement climatique.
J’ai accepté cette invitation dans le but de parler en direct avec Nicolas Hulot, pour qui j’ai beaucoup de respect tant il est clair dans ses convictions et sa volonté de faire bouger. Pouvoir parler en direct, je l’espère aussi avec François Hollande, qui va devoir faire ses preuves et poser des actes pour que la conférence de Paris soit une étape historique et efface l’échec cuisant de Copenhagues. Je continue à défendre mes sujets que sont l’agriculture et l’alimentation, une agriculture respectueuse des équilibres pour tendre vers la souveraineté alimentaire pour chacun des territoires. Plus que jamais, je crois en l’absolue nécessité d’évoluer vers une gouvernance mondiale de l’alimentation, et ne pas laisser la loi du marché aux seuls tenants de l’agro-business.
De retour des Philippines
Ce fut un voyage éclair avec départ le mercredi et retour dans la nuit du vendredi au samedi. J’en reviens avec beaucoup de motifs de satisfaction… avec des interrogations aussi, tant les enjeux sont énormes.
En acceptant l’organisation de la COP 21 de décembre 2015, la France s’est engagée à réussir une négociation planétaire qui conduise à conclure un accord ambitieux, équitable et universel sur le climat. Ainsi, selon les propos du président de la République, décembre 2015 doit entrer dans l’histoire de l’humanité, avec le devoir de réussir : comment les jeunes générations pourraient admettre que l’on soit incapables de prendre les mesures nécessaires afin d’assurer la survie de la planète et de leur préparer un avenir viable et vivable ? Alors oui, les enjeux sont énormes, et s’il est tard pour agir, il n’est pas trop tard. Nous sommes en situation d’urgence, j’en étais convaincu, mais au retour de Manille, je le suis plus encore… et plus motivé que jamais ! Quel intérêt de participer à un tel déplacement, si loin et si court ? Il s’agit d’une visite d’état du président de la République auprès de son homologue Philippin dans le cadre de la préparation de la COP21. Le territoire Philippin est l’un des plus exposé de la planète au effets du dérèglement climatique et parmi les pays en développement, la position Philippine va dans le sens de la recherche d’un accord ambitieux. Dans les négociations, sa voix aura un poids important.
Pour moi, être invité à participer à ce voyage est à la fois un honneur d’être l’un des membres de la représentation nationale, une reconnaissance aussi, pour mes positionnements sur les questions planétaires, et la possibilité dans les différents échanges de faire entendre ma voix.
Manille, à l’autre bout du monde, mégalopole de plus de 20 millions d’habitants sur une population Philippine qui dépasse les 100 millions d’habitants. Comme dans tous les pays en développement, une grande partie de la population est très pauvre. Population très souriante et accueillante aux yeux de laquelle la France représente beaucoup de valeurs… à nous d’être à la hauteur de cette réputation dont notre pays jouit encore partout dans le monde.
Voyage pour moi très riche en rencontres et en échanges de qualité. Je vous livre quelques mots sur les personnes que j’ai pu cotoyer.
Nicolas Hulot. J’ai été très heureux de pouvoir le rencontrer. Il joue un rôle essentiel auprès du président de la république dans le cadre de la préparation de la conférence environnementale de Paris 2015. Jusqu’à ce voyage, nous nous étions juste entre aperçus, cette fois nous avons pu véritablement échanger : on parle le même langage, le langage écologiste non dogmatique : nos objectifs sont communs et on va pouvoir œuvrer ensemble, dans la même direction. Depuis plusieurs mois, je travailler en étroite collaboration avec les membres de sa fondation. Nicolas Hulot est quelqu’un de sincère et authentique. Il a pris des risques en prenant cette fonction, il mérite d’être soutenu. Nous étions trois parlementaire dans la délégation.
Au delà des appartenances politiques, il y a des personnes humaines et ces quelques jours nous ont permis de faire connaissance : Gérard Miquel, sénateur PS du Lot, maire de ce magnifique village qu’est Saint-Cirq-Lapopie. Arlette Grosskost, députée UMP du Bas-Rhin. Trois parlementaires d’horizons totalement différents, et de sensibilités différentes nous nous sommes trouvé beaucoup de points de convergence sur ces questions de dérèglement climatique.
Jean Jouzel, climatologue, vice-président du GIEC (groupement d’experts internationaux pour l’évolution du climat) faisait aussi partie de la délégation et est intervenu lors d’une des conférences. Co-prix nobel de la paix en 2007 pour les travaux sur le GIEC. Une vraie référence scientifique, devenu un profond militant du climat suite aux travaux qu’il a menés ; pédagogue et très simple dans son approche. Quand je lui ai dit que j’étais très heureux de faire sa connaissance, il m’a répondu que lui aussi : la communauté scientifique a besoin de relais politiques convaincus, forts… et désintéressés !
Aquilino Pinatel III, sénateur du parti démocratique Philippin, parti du Président. Il était mon voisin de table au dîner présidentiel. On a pu communiquer l’un et l’autre par notre anglais quelque peu approximatif, mais suffisant. Il est juriste de formation et on a pu échanger longuement sur la question des terres agricoles achetées par de grands groupes financiers aux seuls fins de faire du business. Il m’a fait savoir que ce type d’achats de terres était interdit chez eux mais que de puissants lobbies tentaient de contourner la loi sur certaines îles de l’archipel, notamment pour l’exploitation d’huile de palme. Il importe aussi que la réforme agraire puisse voir le jour : votée il y a 27 ans, elle n’a jamais pu être pleinement mise en œuvre, en raison de l’influence de riches propriétaires terriens.
Ségolène Royal, Ministre de l’écologie était toute à sa place, auprès du Président pour ce déplacement d’état où le développement durable était au cœur des échanges. Nous avons pu longuement échanger sur la loi de transition énergétique qu’elle a porté pendant deux semaines devant notre assemblée. Tout en reconnaissant son soutien qui nous a permis de faire adopter un nombre important d’amendements, nous n’avons pu que voter contre le projet en raison des reculs sur la limitation du nucléaire et les 1 000 m de distance minimale entre une habitation et une implantation éolienne. La deuxième lecture à l’assemblée devra revenir au texte initial, tout en préservant nos acquis écologistes. Ségolène Royal est pour nous une précieuse alliée sur les questions liées à l’écologie et au développement durable. Elle sera à même de le confirmer lors de l’examen de la loi biodiversité.
Marion Cotillard et Mélanie Laurent. J’avais, moi aussi, été surpris d’apprendre que deux actrices seraient du voyage. Ce n’était pas dû au hasard : l’une comme l’autre sont mobilisées sur le sujet du climat depuis plusieurs années. Ni l’une, ni l’autre, n’en ont besoin pour assurer leur notoriété. Les entendre dire qu’en tant que jeunes mamans elles se sentent concernées et tiennent à apporter leur contribution a suffit pour démontrer leur sincérité. Alors tant mieux si leur statut attire les caméras vers les sujets pour lesquelles elles se sont mobilisées.
François Hollande. Le président de la République tenait à la réussite de ce voyage, comme une étape sur la route de la conférence environnementale de Paris 2015. Pour la réussir, une mobilisation la plus large possible sera nécessaire. Nous avons pu longuement échanger à ce sujet lors du dîner du retour que le président nous a invités à partager avec lui en présence de ses 3 ministres, de Nicolas Hulot, de Marion Cotillard et Mélanie Laurent. Il s’est montré à la fois très décontracté et très à l’écoute. J’ai pu en profiter pour évoquer les domaines de l’agriculture et de l’alimentation au cœur des enjeux planétaires, en insistant sur la question des sols, au triple rôle de nourrir, de préserver la biodiversité, et d’être de formidables puits à carbone ; cela dans la mesure où l’on préserve leur qualité de milieux vivants, riches en matières organiques. J’ai fait remarquer au Président que dans ses discours, il mettait beaucoup en avant la science pour donner des solutions aux dérèglements planétaires et en particulier la science liée aux bio-technologies ; je l’ai invité à s’intéresser à une science quelque peu délaissée ces dernières décennies, la science de l’agronomie, celle qui respecte l’équilibre des sols, celle qui respecte la vie des sols. Pour ma part, c’est sur ces sujets que je resterai mobilisé, tant sur les bancs du Sénat que sur le territoire du Morbihan et dans mes engagements sur la conférence environnementale.
Alors, ce fut un beau voyage, à l’autre bout de la planète, un voyage qui m’a confirmé que le monde est un village, un grand village qui doit rester vivable pour les générations futures. Nous en avons la responsabilité.