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VIDEO. Participation citoyenne : «Il n’y a pas d’obligation pour les députés de délibérer d’une pétition»

20 MINUTES – 03/10/2017 – Par Thibaut Le Gal

 POLITIQUE / Le documentaire «Des Clics de Conscience», qui sort mercredi au cinéma, montre la difficulté des citoyens pour participer à l’élaboration de la loi…

• Le documentaire « Des Clics de Conscience », sort mercredi au cinéma et montre la difficulté des citoyens pour participer à l’élaboration de la loi.
• Entre 2007 et 2012, 36 pétitions ont été examinées… pour 36 classées, sans faire l’objet d’un débat.
• Le groupe de travail « démocratie numérique et participation citoyenne » doit donner des pistes pour reformer le « droit d’amendement citoyen » en décembre.

« On s’est dit qu’on allait essayer de changer les règles. » En juin 2015, Alexandre Lumbroso et Jonathan Attias lancent une pétition pour préserver les semences traditionnelles et permettre aux agriculteurs de s’échanger librement ces graines. « Nous avons obtenu plus de 75.000 signatures. C’est un sujet compliqué mais qui est à la base de notre système alimentaire devenu standardisé, raconte Alexandre Lumbroso. Face à ce succès, nous nous retrouvions liés à notre promesse. »

Les deux militants espèrent faire entendre la voix des signataires et changer la loi. Ils impriment la pétition (plus de 1.000 pages !) pour la déposer chez le ministre de l’Agriculture de l’époque, Stéphane Le Foll. Douche froide. « On s’est vite aperçu qu’une pétition peut être un outil pour obtenir une influence médiatique mais qu’il n’y a en France aucun mécanisme entraînant automatiquement une prise en compte des pouvoirs publics », précise le coréalisateur Des Clics de Conscience. Ce documentaire, qui retrace leur aventure, sort en France mercredi.

Entre 2007 et 2012, 36 pétitions ont été examinées… pour 36 classées

« Avec la Révolution française, le droit de pétition devient un mécanisme politique majeur permettant aux citoyens d’être entendus à l’Assemblée nationale. S’il a survécu, il n’a aujourd’hui plus aucun effet politique », confirme Loïc Blondiaux, professeur de sciences politiques à Paris I et spécialiste des phénomènes participatifs. « Peu importe le nombre de signataires, il n’y a pas d’obligation pour les députés de délibérer d’une pétition, comme c’est par exemple le cas en Finlande, qui a fixé un cap à 50.000 signatures. »

Le site de l’Assemblée nationale rappelle le sort funeste réservé aux pétitions adressées au président du palais Bourbon. Entre 2007 et 2012, 36 pétitions ont été examinées… pour 36 classées, sans faire l’objet d’un débat. « Il existe d’autres mécanismes à l’échelle européenne ou par l’intermédiaire du  Conseil économique, social et environnemental, mais dans les deux cas, les conditions à remplir sont contraignantes et les organismes peuvent exercer un filtre sur les sujets traités », poursuit le chercheur.

« Il serait temps qu’on mette en place un droit d’amendement citoyen »

Alexandre Lumbroso et Jonathan Attias changent leur fusil d’épaule et contactent le sénateur écolo Joël Labbé. « Nous savions qu’il avait utilisé pour sa loi d’interdiction des pesticides dans les communes en 2013 la plateforme Parlement et citoyens, qui permet à un parlementaire d’ouvrir un texte à la co-construction avec les citoyens », rappelle le réalisateur.

L’intéressé confirme : « J’étais intéressé par leur démarche et nous avons commencé à travailler sur cette plateforme pour écrire deux amendements à la loi sur la biodiversité », indique l’écologiste. Un seul sera finalement retenu lors du vote final à l’Assemblée.

Comme les deux réalisteurs, Joël Labbé veut aller plus loin dans l’association des citoyens à l’élaboration de la loi. « Aujourd’hui, la coconstruction nécessite le volontarisme d’un parlementaire. Il serait temps qu’on mette en place un droit d’amendement citoyen. Cela permettrait à un texte, signé par un nombre important de personnes, d’être débattu au Parlement. »

« La tâche est immense, mais il faut renouer le lien avec la population »

Reprenant les promesses d’Emmanuel Macron, le président de l’Assemblée nationale François de Rugy a évoqué le sujet fin septembre en présentant sa réforme du parlement. Le groupe de travail « démocratie numérique et participation citoyenne », chargé de ces questions, doit rendre en décembre ses premières pistes.

« Nous commençons les auditions et allons mettre une structure collaborative pour demander l’avis des citoyens sur tout un tas de dispositifs : pétitions, consultations numériques, ateliers législatifs citoyens, etc », indique la présidente du groupe, Cécile Untermaier. « A nous aussi d’imaginer des gardes-fous contre l’instrumentalisation ou les lobbys, qui pourraient se nicher derrière certaines initiatives. La tâche est immense, mais tous les parlementaires sentent qu’il faut renouer le lien avec la population », précise la députée Nouvelle Gauche.

« La France est relativement en retard car notre culture politique valorise la toute puissance de l’élu et conduit le citoyen à un rôle relativement passif », avance Loïc Blondiaux, auditionné ce mardi par le groupe de travail. « Mais de nombreux outils sont déjà là. A la volonté politique de les mettre en œuvre. »

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