Inf’OGM – Frédéric PRAT, janvier 2016
22 janvier 2016 : au cours de la discussion au Sénat sur le projet de loi biodiversité, certains sénateurs ont tenté d’introduire, sous forme d’amendement, un nouvel article pour suspendre la vente de semences de colza et de tournesols tolérantes aux herbicides issues de mutagénèse. Sans succès.
Suivre les discussions au Sénat ou à l’Assemblée autour d’une loi peut parfois s’avérer fastidieux, mais est souvent l’occasion d’entendre clairement les positions de chacun, sénateurs, députés, et gouvernement. Au cours de la discussion au Sénat sur le projet de loi biodiversité [1], les groupes communistes (Évelyne Didier) et écologistes (Joël Labbé) ont tenté d’introduire, sous forme d’amendement [2], un nouvel article pour suspendre « l’utilisation, la culture et la commercialisation de semences de colza et de tournesols tolérants aux herbicides issues de mutagénèse ».
Pour Évelyne Didier, « les scientifiques nous alertent des dangers de la transmission de gènes ; le colza se dissémine facilement, le colza ainsi génétiquement modifié s’intercalerait dans les cultures de blé et d’autres céréales, favorisant le développement de plantes adventices rendues elles-mêmes résistantes aux produits phytosanitaires : on risque en conséquence des atteintes irréversibles à notre biodiversité ». Joël Labbé renchérit : « on élabore des colzas résistants aux herbicides qui s’hybrideront facilement, on le sait, avec de nombreuses autres espèces de plantes sauvages, dont la dissémination est incontrôlable et que l’on devra traiter de plus en plus. (…) De grâce, nous voulons ici la reconquête de la biodiversité, alors votons d’urgence ce moratoire ! ». Pour Ronan Dantec (écologiste), « on sélectionne [des plantes] qui résistent aux agressions chimiques : on fabrique des monstres qui vont nous échapper ! ». « Ces semences de mutagénèse, sont vendues par ceux-là mêmes qui vendent des herbicides… Cherchez l’erreur ! » a conclu Marie-Christine Blandin, toujours pour les écologistes.
Ségolène Royal, la ministre de l’Environnement, a défendu cet amendement : « Le problème existe puisque ces plantes sont quasiment des OGM, sans moratoire cependant. J’ai saisi l’Anses le 4 mars dernier avec le ministre de l’agriculture – je peux vous communiquer la lettre de mission. Votre amendement pourrait accélérer ce dossier, en montrant la volonté du législateur de faire la lumière sur le sujet ». Mais plutôt que de déclarer que le gouvernement était favorable à cet amendement, elle s’en est remise à la sagesse des sénateurs.
Ni Jérôme Bignon (Les Républicains), rapporteur, qui a émis un avis défavorable, ni les sénateurs de droite n’ont été convaincus. Minoritaires au moment du vote, ils ont donc demandé un scrutin public [3], où chaque groupe peut voter pour l’ensemble des sénateurs de son groupe, même absents… et ont ainsi pu rejeter ces amendements par 165 voix contre 33.
Les députés reviendront-ils sur le sujet en deuxième lecture ?
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[2] Amendement n°40, présenté par Évelyne Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen et Amendement identique n°470 rectifié, présenté par Joël Labbé et les membres du groupe écologiste
[3] Le vote par scrutin public ordinaire a lieu notamment à la demande du Gouvernement, du président de l’assemblée, d’un ou de plusieurs présidents de groupe, ou de la commission saisie au fond. À l’Assemblée, la Conférence des présidents peut décider d’organiser un scrutin public sur un texte lors d’une séance choisie à l’avance pour permettre une large participation des députés (on parle alors de vote solennel). Ce scrutin est de droit au Sénat pour les lois organiques, les révisions constitutionnelles et l’adoption du budget. Les parlementaires votent alors au moyen d’un boîtier électronique (à l’Assemblée nationale) ou de bulletins de différentes couleurs (au Sénat). Les résultats du vote sont publiés au Journal officiel. (source : http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/fonctionnement/parlement/assemblee-nationale-senat/comment-votent-parlementaires.html)