M. Le Foll, soyez le ministre de l’équité entre les agricultures et du soutien à l’agroécologie ; optez pour une véritable redistribution des subventions européennes !
L’élaboration de la Politique Agricole Commune et son application dans les États entrent en phase de finalisation. Cette réforme de la PAC, pour la période 2014-2020, portée par Dacian Ciolos, Commissaire européen à l’Agriculture, après bien des compromis et des reculs, permet néanmoins aux États de redistribuer des aides directes (1er pilier) vers tous les hectares en dessous de la dimension moyenne nationale des exploitations. Cette disposition, dont le niveau et le mode d’application dépend des Etats eux-mêmes, est une occasion historique de revoir les déséquilibres actuels de la distribution des aides entre agriculteurs.
En effet, depuis les accords du Luxembourg en 2003, les droits à paiement unique à l’hectare (DPU) ont été instaurés. Ces DPU, calculés sur les aides directes perçues entre 2000 et 2002 (références historiques) ont maintenu puis aggravé une situation particulièrement inégalitaire entre les agriculteurs puisque 80 % des subventions européennes sont distribuées à seulement 20 % d’entre eux.
Ce système a soutenu l’agrandissement des exploitations (course à l’ha primé), encouragé le démantèlement et la marginalisation des plus petites exploitations, surentabilisé l’activité céréalière, desservi l’élevage notamment l’élevage bovin/lait à l’herbe. Plus on a d’hectares, plus on a d’aides et un hectare de céréales égale dix hectares d’herbe ! Le résultat de cette politique a été profondément négatif en matière d’emploi paysan et de la nécessaire évolution écologique des pratiques agricoles.
Le ministre de l’Agriculture doit rendre son arbitrage dans les tous prochains jours sur l’application de la PAC en France. Différents scénarii plus ou moins redistributifs – compte-tenu du niveau d’application de cette disposition – sont étudiés et les pressions sont fortes de la part de la FNSEA pour une application à minima.
Dans l’un de ses scénariis, la France envisage de consacrer 30% de son enveloppe nationale à ce paiement redistributif. Ce scénario, le n°3, le plus efficient en matière de rééquilibrage, permet une évolution des subventions européennes de + 22 % pour les élevages bovins viandes herbagers et de + 14 % pour les élevages bovins lait herbe et mixtes. Il permet aussi de soutenir l’emploi par un maintien accru des diverses petites exploitations. Ce rééquilibrage pourrait (enfin) sortir l’élevage de la crise avec un soutien couplé additionnel pour les productions animales.
Le retour vers l’équité est indispensable pour la survie de nos territoires. Seule l’application du scénario 3 permettra une véritable redistribution et réorientation de l’agriculture. M. Le Foll, ne cédez pas aux pressions de l’agro-industrie, défendez les paysans !
José Bové (Député européen et vice-président de la Commission Agricole du PE)
Danielle Auroi (Députée du Puy de Dôme, présidente de la Commission Europe de l’AN et rapporteur sur la PAC)
Brigitte Allain (Députée de Dordogne et membre de la Commission des Affaires économiques de l’AN)
Joël Labbé (Sénateur du Morbihan et vice-président de la Commission des Affaires économiques du Sénat)
François Dufour (Vice-président en charge de l’Agriculture en Région Basse Normandie)
Michelle Rivet (Vice-présidente au Développement durable en Région Centre)
Elise Lowy (Porte-parole d’EELV)
René Louail (Conseiller régional de Bretagne)