À la demande du groupe Les Républicains, le Sénat a examiné la proposition de loi constitutionnelle tendant à favoriser la simplification du droit pour les collectivités territoriales et à encadrer la transposition des directives européennes, présentée par M. Rémy POINTEREAU (Les Républicains – Cher), Premier Vice-Président, chargé de la simplification des normes de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
Cette proposition de loi constitutionnelle vise à simplifier les normes et alléger les charges applicables aux collectivités territoriales.
À cette fin, la proposition de loi, renommée et amendée par la commission des lois sur le rapport de M. Jean-Pierre VIAL (Les Républicains – Savoie), prévoit :
· d’insérer, après l’article 39 de la Constitution, un article 39-1 qui dispose que toute mesure créant ou aggravant une charge pour les collectivités territoriales fait l’objet d’une évaluation préalable et d’une compensation ;
· d’insérer au titre XV de la Constitution relatif à l’Union européenne un article 88-8 qui dispose que les mesures assurant la transposition d’un acte législatif européen ne peuvent excéder les objectifs poursuivis par cet acte.
En séance publique, les sénateurs ont adopté un amendement du rapporteur de la commission des lois, portant article additionnel après l’article 1er et tendant à modifier l’article 72-2 de la Constitution afin d’élargir le principe d’une compensation pour le transfert d’une compétence entre collectivités territoriales et d’introduire le principe d’une réévaluation régulière de la compensation des transferts, créations et extensions de compétences au profit des collectivités territoriales.
Conformément à l’article 59 du règlement du Sénat, la proposition de loi constitutionnelle a fait l’objet d’un scrutin public ordinaire de droit. Le texte a été adopté par 187 voix pour et 149 voix contre.
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Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le chantier de la simplification est en cours depuis le mois de mars 2013 avec l’annonce, par le Président de la République, de son « choc de simplification ».
Je ne suis pas nécessairement convaincu par les thérapies de choc. De manière générale, je préfère les évolutions aux révolutions, les petits matins aux grands soirs, les transitions concertées aux bouleversements soudains et imposés. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Rémy Pointereau. Vraiment ?
M. Joël Labbé. Cela vient peut-être avec l’âge, chers collègues ! (Sourires.)
Heureusement, dans cette œuvre de simplification, il y a eu de la concertation. Nous avons examiné, dans cet hémicycle, de nombreux textes de simplification ces deux dernières années et la plupart d’entre eux ont fait l’objet d’une concertation préalable avec les acteurs économiques et institutionnels.
C’est aujourd’hui le travail de notre délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation qui est en discussion. Il ne s’agit pas d’un travail partisan. Par les temps qui courent, c’est particulièrement appréciable !
En tant qu’ancien maire, je comprends très bien la détresse de certains élus locaux face aux réglementations extrêmement complexes, notamment en matière d’urbanisme. Cette résolution vient répondre à cette détresse, et je souscris à l’objectif de ses auteurs.
Toutefois, les écologistes resteront vigilants (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), car il ne faut pas confondre simplification et déréglementation. Certaines normes sont utiles et n’ont pas été adoptées par hasard, en particulier lorsque des excès ont été commis.
M. Alain Gournac. Trop d’excès !
Elles méritent parfois d’être assouplies, mais il ne faut pas que leur utilité s’en trouve écornée.
Il serait nécessaire d’établir un premier bilan de l’activité du Conseil national d’évaluation des normes, que notre assemblée a réformé en adoptant une proposition de loi présentée sur l’initiative commune de deux de ses « piliers », Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur, dont je veux saluer ici le travail et la détermination.
La loi du 17 octobre 2013 a permis de consacrer, grâce à un amendement de notre ancienne collègue Hélène Lipietz – je tiens à la saluer, car je sais qu’elle est présente dans nos murs aujourd’hui –, la proposition du Président de la République consistant à abroger une norme devenue inutile ou obsolète chaque fois qu’une norme nouvelle est applicable aux collectivités territoriales. Ainsi, « l’avis rendu par le Conseil national sur des dispositions réglementaires en vigueur peut proposer des modalités de simplification de ces dispositions et l’abrogation de normes devenues obsolètes ». C’est donc avec une certaine satisfaction que je peux aujourd’hui oser soutenir ce texte,…
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. Joël Labbé. … qui vise à renforcer ce principe. Ce texte prend des précautions bienvenues lorsqu’il indique, dans son alinéa 6, que les normes nouvelles doivent entraîner une simplification ou une suppression uniquement dans le cas où elles constituent une contrainte ou une charge pour les collectivités territoriales.
La proposition d’élaborer une charte nationale harmonisant les niveaux d’exigence des commissions de sécurité, des offices préventionnistes et des architectes des bâtiments de France est, selon nous, intéressante. Elle pourra permettre une application plus lisible des différentes normes sur l’ensemble du territoire national, d’une façon objective et non plus subjective, en fonction du regard du fonctionnaire ou de l’organisme chargé de les appliquer.
Les écologistes seront vigilants si le Gouvernement traduit effectivement la présente résolution en actes réglementaires. Ainsi, concernant l’assainissement collectif, je comprends parfaitement l’objectif visé, mais la possibilité d’une application laxiste de la délivrance de permis de construire sur la foi de simples délais déclaratifs de mise en conformité m’inquiète. Il faudra faire preuve de fermeté dans ce domaine !
De la même manière, j’aimerais bien connaître la définition des actes de « faible importance » qui seraient exclus du contrôle de légalité en matière d’urbanisme. Ne faut-il pas renforcer les effectifs chargés du contrôle, puisqu’il semble que le contrôle effectif des actes soit insuffisant, plutôt qu’exclure du cadre du contrôle un grand nombre d’actes administratifs au risque qu’ils ne respectent pas la loi, malgré leur toute relative « moindre importance » ? Le respect de la loi ne peut être à géométrie variable. Certes, malheureusement, tel est trop souvent le cas dans les faits, mais nous ne pouvons nous en accommoder !
Ces réserves posées, au regard de l’esprit d’authentique simplification qui inspire ce texte très attendu, je voterai cette proposition de résolution au nom de mon groupe. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Puisqu’il me reste quinze secondes de temps de parole, j’en profite pour indiquer que l’un de nos futurs axes de travail pourrait être le droit à l’expérimentation encadrée en matière d’urbanisme. J’ai eu l’occasion de visiter un endroit regroupant tous les types d’habitats alternatifs – yourtes, cabanes, habitats en paille et terre –, installés sans véritable autorisation, mais extrêmement respectueux de l’esprit de la COP 21. Sur de telles questions, je réclame le droit à l’expérimentation, mais il sera nécessaire d’en débattre de nouveau. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.)
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