Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai écouté avec attention les intervenants précédents dans ce match où on se renvoie la balle. D’un côté, le Gouvernement ne fait rien ; de l’autre, il faut envoyer des signes au monde rural. Pour être au cœur de ces débats, je peux vous dire que le Gouvernement fait ce qu’il peut et qu’il a de bonnes intentions, même s’il doit aller plus loin.
À mon sens, il est suspect de vouloir adresser un signal à l’approche d’élections. Certes, des marques d’attention doivent être données, mais nous le faisons, me semble-t-il, tous dans cette assemblée, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons. On ne peut pas dire que le Gouvernement délaisse le monde rural. La situation n’est pas simple. En revanche, il est vrai que les territoires ruraux, qu’on le veuille ou non, se sentent oubliés, abandonnés. On constate d’ailleurs un certain affaiblissement de la cohésion sociale en milieu rural.
Il faut souligner également les nombreux bouleversements en cours de notre organisation territoriale, notamment la loi « métropoles », dans laquelle mes collègues Hélène Lipietz et Ronan Dantec – mais ils n’étaient pas les seuls – ont contribué au Sénat à faire en sorte que l’on n’oublie pas les territoires ruraux, en rénovant la notion de pays, en préservant les conseils de développement, et surtout en inventant collectivement, avec vous, mes chers collègues, les pôles d’équilibre territoriaux ruraux. Nous pouvons être fiers de ces pôles, et nous devons suivre leur évolution dans nos territoires.
Il est indispensable de mener dans notre pays une politique cohérente de la ruralité, et le Sénat, qui représente les territoires, l’affirme avec force chaque fois qu’il en a l’occasion. Il faut toutefois veiller à bien évaluer l’impact de l’ensemble des bouleversements engendrés par les lois de métropolisation, de fusion des régions, de répartition des compétences entre tous les échelons de la décentralisation.
Prêtons attention à ne pas introduire de nouvelle complexité dans l’organisation territoriale, alors même que, les uns et les autres, nous pestons contre l’excès de normes et que le Gouvernement, comme le Sénat, cherche à simplifier l’ensemble de notre corpus juridique et administratif.
Mon collègue Ronan Dantec a soutenu en commission, à ma demande, un amendement de clarification précisant que les parcs naturels régionaux, ou PNR, pouvaient être porteurs des contrats de développement ruraux.
Mme la rapporteur nous ayant expliqué que c’était déjà possible, j’ai choisi de ne pas représenter cet amendement en séance. Les PNR sont des syndicats mixtes, mais ils peuvent par délégation porter des politiques au-delà de leur périmètre. Nous veillerons donc à ce qu’ils ne soient pas exclus du champ des contrats de développement ruraux, car ils sont, dans les territoires où ils existent, les acteurs clés de la réussite de ces contrats.
Je tiens aussi à évoquer ici la question agricole : comment parler de ruralité sans parler agriculture ? Depuis toujours, en France comme ailleurs dans le monde, l’activité agricole est, et reste, au cœur des campagnes. Prenons soin de la terre, des paysages, de l’environnement et de la biodiversité. L’agriculture paysanne et familiale doit être confortée au cœur de la ruralité ; le développement des filières en circuit court et des projets alimentaires territoriaux, prévus dans la loi d’avenir pour l’agriculture, devront permettre d’apporter une nouvelle dynamique aux territoires ruraux.
Cette relocalisation de notre économie alimentaire sera bénéfique pour l’ensemble de notre population, qu’elle soit urbaine ou rurale. Elle le sera aussi pour les territoires ruraux de tous les autres pays du monde, dans la mesure où nous cesserons de concurrencer leurs propres produits. Appelons de nos vœux, à la veille de la COP 21, la mise en place d’une véritable gouvernance mondiale de l’alimentation, afin que ce ne soit pas le marché qui décide.
Revenons-en à cette proposition de loi : elle envoie un signe au monde rural, qui en a besoin, mais elle est, pour nous, inaboutie. Aussi – cela n’est ni de la mollesse ni de la neutralité –, dans l’attente de la navette avec l’Assemblée nationale, nous, écologistes, préférerons nous abstenir sur ce texte.
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