­

Evolution de la réglementation au titre de la directive « nitrates » et modification des normes CORPEN vaches laitières

14 e législature / Question écrite n° 01491
> publiée dans le JO Sénat du 09/08/2012 – page 1790

M. Joël Labbé attire l’attention de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt sur la modification des normes CORPEN (Comité d’orientation pour des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement) vaches laitières.
Pris dans le cadre de la révision de l’application de la directive « nitrates », le décret n° 2011-1257 du 10 octobre 2011 puis l’arrêté du 19 décembre 2011 interrogent fortement la communauté paysanne.
Le décret du 10 octobre 2011 modifie le calcul de la production d’azote possible sur une exploitation, en remplaçant la surface potentiellement épandable (SPE) par la surface agricole utile (SAU) comme base de calcul. Bien que les contraintes d’épandage soient toujours à respecter, la limite de 170 kg d’azote par hectare de SAU augmente les possibilités d’épandage pour l’exploitation, et de ce fait les effectifs possibles des animaux. Une logique difficile à comprendre pour les acteurs engagés dans la reconquête de la qualité de l’eau en Bretagne qui prônent déjà depuis plusieurs années une nécessaire désintensification de l’élevage.
L’arrêté du 19 décembre 2011 fixe quant à lui une nouvelle évaluation des normes de rejets azotés pour les vaches laitières, faisant apparaître les systèmes herbagers pâturants comme plus polluants que les autres. La norme unique (85 kg d’azote par vache) a été remplacée par une norme variable en fonction du temps passé à l’extérieur et du niveau de production de la vache : plus la vache est au pré et plus elle produit, plus la norme est élevée. Cette évolution des normes en fonction du « temps de pâturage », spécificité française dans le contexte européen, décourage fortement les éleveurs laitiers de développer le pâturage. Parallèlement, dans le cadre du plan gouvernemental de lutte contre les marées vertes, l’État les encourage au contraire à augmenter leurs surfaces en herbe, ce qui rend difficilement lisible la cohérence de l’action publique.
L’objectif étant de réduire la pollution de l’eau par les nitrates, il est anormal que ne soit pas prise en compte la capacité des prairies à recycler les rejets d’azote. Il est reconnu aujourd’hui que le système herbager préserve au mieux la qualité des sols et de l’eau, ainsi que l’ensemble de la biodiversité. Les deux textes juxtaposés lui appliquent pourtant des contraintes aggravées, alors que les systèmes hors- sol ou « pâturant moins de quatre mois » voient leur charge théorique en azote réduite.
Par ailleurs, comme le souligne le conseil scientifique de l’environnement de Bretagne, il est étonnant de constater que les normes choisies pour l’arrêté du 19 décembre 2011 ne soient pas tout à fait alignées sur les normes INRA-CORPEN.
Ce nouveau calcul des normes CORPEN est de plus fortement déstabilisateur pour les agriculteurs ayant contractualisé des mesures agro-environnementales (MAE). Ceux-ci ne pourront pas respecter leurs engagements.
Si l’obtention d’une dérogation aux 170 kg d’azote par hectare de SAU pour les systèmes herbagers, solution envisagée par les services du ministère, apparaît plus qu’hypothétique dans le contexte actuel du contentieux avec Bruxelles, elle ne règle pas non plus le problème du message passé aux agriculteurs, dont la réponse technique immédiate à l’évolution des normes CORPEN sera de réduire les surfaces en herbe. De plus, un système dérogatoire, par nature temporaire et pouvant être remis en cause à tout moment, ne permet pas de sécuriser durablement le choix fourrager d’une exploitation.
La combinaison des deux textes en vigueur faisant courir le risque d’une diminution à très court terme des systèmes herbagers, pourtant reconnus comme les garants d’une maîtrise de la pollution des eaux par les nitrates, Il lui demande de procéder à une modification de l’arrêté du 19 décembre 2011, en particulier de redéfinir les normes CORPEN vaches laitières, et de ne pas pénaliser les agriculteurs engagés dans des MAE avant leurs termes.

Réponse du Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

Laisser un Commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

ouvrir